• Tout s'est passé trop vite: à peine le temps de comprendre ce qui m'arrivait, déjà happée par une ambulance immaculée, j'agonise lentement.
    Je vais mourir, c'est certain. C'est dommage car rencontrer la mort à seulement vingt ans, c'est comme être une fleur magnifique qui jamais n'éclorera au grand jour.
    J'ai mal à la tête. Sans doute à cause de cette saleté de morphine: pour anesthésier la douleur c'est très efficace il faut l'avouer mais alors les effets secondaires n'en parlons pas...
    Vraiment quelle bien triste destinée que de finir sa vie à l'arrière d'une ambulance
    fonçant à toute allure vers l'hôpital le plus proche toutes sirènes hurlantes.
    De plus tout ceci n'a été qu'un affreux concours de circonstances: deux types se battaient dans la rue pour une sombre histoire de drogue si j'ai bien tout saisi et en l'un d'eux j'ai soudain reconnu un ancien ami de  lycée. Sans crier gare, l'autre a alors sorti un revolver et l'a mis en joue, prêt à en découdre une bonne fois pour toutes. A ce moment-là, je ne sais pas trop ce qui m'a pris mais, sans réfléchir, je me suis élancée, m'interposant entre eux et ai reçu en plein coeur la balle qui lui était destinée. Après, plus rien. Le vide total.
    Tout ce dont je me souviens c'est lui hurlant mon nom et les lumières dansantes accompagnées du hurlement assourdissant de l'ambulance qui me fait ressentir, plus terrifiante de minute en minute, l'angoisse de la mort.
    Le véhicule s'arrête enfin. Suis-je morte? Non apparemment: car je peux encore entendre, mais venant de très loin, la voix de l'infirmier qui demande, préoccupé:
    "- Dites les gars, vous êtes sûrs qu'on ne devrait pas l'envoyer directement à la morgue cette fille? De toute façon, avec une telle blessure, elle n'aurait pas tenu le coup bien longtemps..."
    J'ai beau essayer de me persuader du contraire, il est à présent évident que toute résistance face à la mort est inutile. Lasse et résignée, je laisse alors aller ma tête contre le minuscule oreiller qu'ils ont placé tout au bord de ma civière, revois dans un flash aveuglant ma trop courte existence, les visages souriants de mes parents puis c'est le noir. Le noir absolu.
    C'en est à tout jamais fini de moi, Emilie Rockwell,alias Eliie ,vingt ans à peine et étudiante en première année de médecine.
    ------------------------------------------------------------------------------------------
    TO BE CONTINUED...

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  • Pour la première fois depuis qu'il avait entamé des études de médecine cinq ans plus tôt Dave allait être en retard.
    Passant en trombe dans le hall d'accueil -manquant bousculer l'un de ses professeurs au passage- il rallia l'amphithéâtre au pas de course, essoufflé.
    Il s'assit à sa place habituelle, s'apprêtait à sortir ses affaires lorsque soudain son voisin releva brusquement le nez du dernier numéro du Parisien qu'il épluchait avec avidité à la recherche de faits divers et d'articles insolites le faisant sursauter. Surexcité celui-ci lança à la cantonade:
    - Hé vous autres vous savez pas la meilleure? Ils disent qu'une fille vingt-ans environ, pas beaucoup plus vieille que nous à vrai dire, s'est fait agresser hier soir vers minuit par des types dealant de la coke alors qu'elle s'apprêtait à en avertir la police. Voilà ce qui arrive à ceux et celles qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas: il paraîtrait qu'elle est maintenant dans le coma avec plusieurs côtes fracturées.
    Un frisson glacé parcourut l'échine de Dave qui sentit un vif pressentiment poindre en lui:
    - Passe moi ça, lança-t-il nerveux.
    Etonné son camarade le lui passa quand tout à coup la voix de leur professeur s'éleva depuis le centre de l'amphi:
    - Messieurs la classe est commencée que je sache, vous serez donc priés de vous taire provisoirement pour écouter et prendre des notes en même temps que vos camarades pour que j'évite de me répéter indéfiniment ce qui constituerait une immense perte de temps pour nous tous dans l'avancement de ce cours. Et vous avez dans un mois votre examen franchement ça promet...
    Quelques ricanements moqueurs fusèrent que l'enseignant fit taire d'un geste en voyant Dave pâlir brusquement. Intrigué il s'enquit d'une voix adoucie par l'inquiétude:
    - Mr. Greenwich ça ne va pas? Vous vous sentez mal?
    Livide le jeune homme ne répondit pas. Hébété, il fixait la une du Parisien les larmes aux yeux ses mains agitées d'un tremblement incoercible.Sous les regards étonnés de ses camarades et de son professeur, il se leva d'un bond, jeta son sac en travers de ses épaules après y avoir fourré le journal en quatrième vitesse et quitta la pièce aussi vite qu'il y était entré. Sans un mot.

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  • Dave courut comme il ne l'avait jamais fait de sa vie et déboula telle une furie dans l'hôpital s'attirant maints regards courroucés voire scandalisés de plusieurs infirmières. Les ignorant superbement, il piqua un sprint jusqu'à la réception:
    - Est... ce que... la nuit dernière... vous avez... admis... une certaine...Emilie Rockwell? croassa- t- il essoufflé et haletant.
    La chargée d'accueil haussa un sourcil:
    - Répétez moi ça doucement, j'ai rien compris.
    - EST CE QU'HIER SOIR VOUS AVEZ ADMIS UNE CERTAINE EMILIE ROCKWELL? cria- t - il.
    -Voyons voir... Oui, en effet chambre 111. Mais faut que je vous prévienne. ici les chambres 110 à 120 sont les seules où ne sont pas autorisées les visites car ce sont des chambres stérilisées.
    Cela fit à Dave l'effet d'un coup dans l'estomac:
    - "Stérilisées"? Qu'est ce que vous entendez par là?
    - Les malades qui sont admis là-bas sont ceux dont l'état est le plus alarmant. Grosso modo, ceux dont les jours sont largement en danger
    - Je vois, fit le jeune homme dans un filet de voix les larmes aux yeux. Mais alors dans ce cas... comment va-t-elle? Est ce qu’il y aurait au moins un mince espoir qu’elle s’en sorte ?
    - Soyons honnêtes non, à moins d'un miracle. Or, malheureusement pour vous, en médecine les miracles n'existent pas. Néanmoins j'ai une proposition à vous faire; et si vous voulez qu'elle s'en sorte c'est la seule alternative possible. Trois jours. C'est le temps qu'il lui reste à vivre: d'ici là, retrouvez les malfrats qui lui ont apparemment injecté dans les veines une drogue de genre tout à fait inconnue qui se révèle toxique voire mortelle puisqu'elle peut déclencher son action à n'importe quel moment et tuer votre amie sur le coup. Et que ces monstres vous en donnent l'antidote qu'ils ont dû fabriquer au cas où cela serait nécessaire lors de sa conception. Autrement dit, ne restez pas planté là car vous n'avez pas une seconde à perdre. Allez du vent ! Regardez autour de vous pour constater que vous n'êtes pas le seul à attendre jeune homme.
    Dave acquiesça mollement, maussade, et s'éloigna à pas lents repartant par où il était venu.
     
    Le moral à zéro, Dave entra dans le premier café venu et se commanda un cappuccino qu'il sirotait, assis au bar, perdu dans ses réflexions lorsqu'une main s'abattit d'un seul coup sur son épaule: 
    - Salut mec j'en aurais mis du temps mais je t'ai retrouvé finalement! 
    Brusquement ramené à la réalité l'intéressé sursauta et se retourna d'un bloc: derrière lui se tenait un homme affublé d'une paire de Rayban rutilante et d'un blouson en cuir noir d'encre Gucci qu'il reconnut instantanément: 
    - Attends une minute Mike. Ca fait un bail que j'ai quitté la bande une bonne fois pour toutes en t'ayant bien prévenu que ma décision était irrévocable. La preuve en est que je suis largement passé à autre chose depuis je viens de commencer des études de médecine.
    - Comme tu voudras mais sache qu'il n'est pas aussi facile que tu sembles le croire de tirer un trait définitif sur son passé de dealer: cela exige de faire quelques concessions notamment d’admettre ses échecs. S'échiner à vouloir sauver quelqu’un qui est d’ores et déjà entre la vie et la mort est vraiment puéril, qui plus est une perte de temps inutile: tout le monde sait que faire une overdose ne laisse pratiquement aucune chance de survie à moins d'un miracle. 
    En tous cas ne compte pas sur nous pour t'aider à te tirer d'affaire si jamais les choses tournent mal parce que ce sont tes problèmes et tu ne pourras pas te plaindre de ne pas avoir au moins été prévenu. 
    - Espèce de... de lâche! Et si c'était l'unique moyen de la sauver ? Tu crois peut-être que je fais ça simplement par plaisir crétin ?!? 
    Mike voulut protester mais n'ayant pas terminé Dave reprit en reposant violemment sa tasse sur le comptoir et se levant à moitié: 
    - J'aime Ellie et toi et les autres le savez mieux que personne. Et c'est bien simple: si dans trois jours elle devait mourir à cause de moi qui n'aurais pas eu le courage de tout risquer pour sa survie je ne pourrais me le pardonner. C'est une promesse que l'on s'est faite au lycée après que je me sois fait brutalement agresser par des voyous qu'elle a réussi à tenir en respect afin de me protéger: nous nous sommes juré que si l'un venait à être dans le pétrin ou en danger de mort, l'autre aurait le devoir de lui venir en aide de quelque façon que ce soit et à n'importe quel prix. Et n'ayant jamais pu lui rendre la pareille après cet incident, je me vois obligé de saisir l'opportunité qui m'est offerte aujourd'hui de remplir ma part du contrat  et puis adviendra que pourra de toute façon. 
    - Bien, vu comme tu as l'air d'être déterminé, fais le mais avant sache une chose: tu cours à une perte certaine car Ellie ne va pas mourir à cause d'une nouvelle sorte de drogue qui lui a été injectée par intraveineuse comme te l'a expliqué la réceptionniste: en réalité les médecins se servent d'elle comme cobaye pour tester un tout nouveau type de médicament contre les effets de la radioactivité pratiquement jamais testé auparavant même sur des animaux et dont une surdose de certains de ses composants chimiques pourrait se révéler non seulement mortelle mais aussi dévastatrice.   
    -Ils vont m'entendre ces s... ! jura Dave.
    Il posa le montant de son addition à côté de sa tasse et s'apprêtait à sortir quand la porte du café s'ouvrit une nouvelle fois.
     
    Tout à coup le monde parut se dissoudre et Dave se sentit tomber à travers une sorte de clair-obscur chatoyant. En proie à une terreur confinant à la névrose il cria et se réveilla en sursaut, couvert de sueur. Encore ensommeillé il pressa la touche snooze de son radioréveil et étouffa un juron en constatant qu'il était seulement une heure du matin. Huit jours avaient passé. Et chaque nuit, de manière récurrente, toujours ce même cauchemar qui le laissait éveillé jusqu'au petit matin errant sans but tel un zombie.
    Il avait bien tenté d'en trouver une interprétation en se plongeant dans l'Introduction à la psychanalyse de Freud mais cela s'était rapidement soldé par un échec la psychologie étant science plus complexe qu'il se l'imaginait. Néanmoins il refusa de s'avouer vaincu et préféra se rabattre sur des revues de vulgarisation bien qu'elles étaient censées être accessibles au plus grand nombre, la plupart le laissaient endormi dans son fauteuil jusqu'à pas d'heure tant il les trouvait assommantes. Au fond de lui il savait que ce combat était vain. Il n'en était pas certain mais ne voulait pas non plus se faire d'illusions: à moins d'un miracle on ne peut survivre à une balle prise en pleine poitrine.
    D'autre part l'idée d'être probablement le seul responsable de la mort d'Emilie ne cessait de le tarauder. Las il se leva pour se servir un café  mais lorsqu'il saisit le bol rempli du liquide brun celui-ci se brisa tout à coup entre ses doigts. Il se souvint alors que cela annonçait un mauvais présage mais étant peu superstitieux n'y prêta pas vraiment attention.
    Il se contenta d'éponger les dégâts, se servit à la place une bière et requinqué attrapa la pile de journaux empilés au pied de son fauteuil, une lampe de lecture et la télécommande de sa chaîne hi-fi. Confortablement installé il se lança alors dans la lecture du dernier numéro de Psycho magazine et mit en fond un cd où il avait gravé pêle-mêle des symphonies de Mozart, Bach, Brahms et Beethoven. Il veillait pourtant à ne réveiller personne avec mais la plupart de ses voisins avaient maintes fois porté plainte pour tapage nocturne. Toutefois chacune des procédures avait tourné court: en effet la police avait estimé après être venue sur le terrain qu'il était relativement grotesque de se plaindre d'un mélomane qui écoutait en lisant du classique à un volume tout à fait correct.
    Pourtant Dave ne tarda pas à entendre des bruits de pas précipités dévaler la cage d'escalier et alla ouvrir, exaspéré:
    - Non mais ça ne finira jamais ce cirque? C'est moi qui vais aller porter plainte si ça continue.
    Sa voisine du dessus, une quinquagénaire depuis peu à la retraite, vitupéra:
    - Ca existe de nos jours les casques stéreo mon cher David. Soit vous vous en procurez un soit vous déménagez! Je ne vois pas d'autre solution... A propos pourquoi veillez vous à des heures pareilles?
    - Insomnies à répétition depuis une semaine.
    - Consultez un spécialiste alors. Ca ne peut plus durer. Bonsoir.
    - C'est ça... Allez vous faire foutre. C'est pas vous qui avez vu un proche mourir sous vos yeux.
    - Si j'avais su... Sincèrement désolée de vous avoir dérangé. Moi aussi j'ai perdu quelqu'un récemment. Ma petite-fille. Elle s'appelait Emilie. Néanmoins les médecins ne sont pas encore formels car elle ne serait encore qu'en état de mort clinique plongée dans un coma profond. Vous vous sentez mal David? Répondez!
    Elle le rattrapa de justesse et porta le jeune homme évanoui jusqu'au clic-clac qui traînait au fond du studio:
    - Répondez!

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  • Enfin je suis guérie. Ou presque. Les médecins ont déclaré qu'ils me gardaient en observation encore une semaine puis qu'à l'issue de ce délai je serais enfin sur pied.
    Je devrais m'en réjouir bien entendu mais je sais pertinemment que s'ils venaient à le savoir il aurait de sérieux ennuis.
    Oh Dave mon amour comme j'aurais aimé te savoir près de moi afin qu'on puisse ne serait-ce que se parler.
    J'hésite encore mais au fond de moi je sais parfaitement que cela nous est impossible désormais.
    ...à un de ces jours peut-être...
    Adieu...
     
    Dave cligna des yeux aveuglé par la lumière qui se déversait à flots sur le clic-clac où il était allongé. Peinant à émerger il voulut se lever pour se préparer un café et un Doliprane mais une main sortie de nulle part lui saisit le poignet et le repoussa doucement au fond du lit de camp:
    - Du calme David. Rendors-toi donc. Grand-mère m'a mise au courant pour tes insomnies. Ce n'est pas d'excitants dont tu as besoin mais de sommeil, espèce de crétin.
    Eperdu, Dave chercha d'où provenait cette voix se répercutant autour de lui à l'infini accompagnée d'un bip bip incessant. N'ayant pas encore recouvré une vision nette il parvint néanmoins à distinguer les contours vagues d'un fauteuil roulant dans lequel une jeune femme était assise, ses cheveux auburn relevés en une simple tresse d'où quelques mèches folles teintées de reflets roux s'échappaient. Toutefois plongée dans l'un des nombreux magazines de psychologie entassés un peu partout à travers le studio elle le couvait d'un regard tendre et attentionné qui ne laissa plus l'ombre d'un doute au jeune homme sur son identité: il peina encore à y croire pourtant c'était bien elle. Ellie s'interrompit dans sa lecture. Tant pis elle ne savait pas comment lui annoncer autrement mais il fallait qu'il sache:
    - Je suis venue pour t'annoncer notre séparation David.
    Au regard à la fois désespéré et fiévreux qu'il posa sur elle, Ellie comprit un peu trop tard à quel point elle l'avait blessé. Mais ce qui est fait est fait; et on ne peut rien y changer malheureusement. On était à la mi-janvier: il faisait doux pourtant un vent glacé s'engouffra en faisant claquer les battants de la fenêtre qu'à son arrivée elle avait entrouverte pour aérer.
     
    ---
     
    *Note: Citation de Leah Goldberg extraite de De ma vieille maison.

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  • Tétanisé Dave se figea à mi-chemin entre son lit et sa kitchenette, se laissa tomber sur l'accoudoir de son vieux fauteuil:
    - Pourquoi?
    - Je ne peux rien te dire sans nous mettre tous les deux en danger.
    - Toi alors! Tu ne changeras donc jamais, tu m'as dit exactement la même chose lorsqu'on s'est séparés après la terminale. Qu'entends tu par là?
    Je ne trouvais rien à répondre et me détournai pour aller préparer un semblant de petit déjeuner. La cafetière en main je le sentis approcher dans mon dos:
    -T'es une sacrée tête de mule mais je t'aime bien, me murmura t il à l'oreille en me massant les cheveux.
    Il me força à lui faire face et s'agenouilla doucement à mes pieds:
    - Je ne suis ni un super-héros ni un prince charmant juste moi. Ce "moi" voudrait tout simplement t'aimer car il t'accepte toute entière, comme tu es...
    - Arrête! L’interrompis-je brusquement. Arrête avec tous ces bons sentiments! On est faits l'un pour l'autre cela est indéniable mais reviens sur terre: tu es dealer, je suis fille de flic. J'admets volontiers qu'il n'est pas impossible de dépasser ces contraintes sociales mais on ne vit pas dans un monde rose bonbon: pour ta gouverne mon père cherche déjà à me marier pour que je quitte enfin le giron familial. Il a toujours voulu maîtriser la moindre parcelle de mon existence...
    Se relevant il m'ouvrit les bras; étroitement blottie contre lui je sentis lentement exploser la carapace que j'avais érigée autour de mon coeur pour supporter le contrecoup de cette séparation forcée:
    - Aide moi... j'en ai assez de cette vie réglée comme du papier à musique. Je veux être libre. Je veux t'aimer. Je veux vivre.
    Enfin débarrassée de mon cocon je suis passée de l'état de chenille à celui de papillon.
    Détendue et soulagée d'avoir finalement confié ce que j'ai sur le coeur à quelqu'un.
    Pourvu que cela dure.
     
    Des coups frappés à la porte; brutale la réalité nous rattrape au galop:
    - Ouvrez! Emilie, je sais que tu es là!
    Mon père. Je réfléchis à toute vitesse mais ne trouve aucune diversion valable.
    - Va te cacher sur le balcon! Siffla Dave en me poussant vers la fenêtre.
    Je déboule sur la minuscule terrasse. Un coup d'oeil en contrebas et j'aperçois l'essaim de voitures de police des renforts mobilisés garées en double file sur le boulevard toutes sirènes hurlantes.
    Lorsque je remarque que l'un des collègues de mon père regarde vaguement vers le balcon je bats aussitôt en retraite mais trop tard: il m'a repérée son talkie walkie collé à l'oreille.
    En désespoir de cause je lui fais signe de raccrocher mais il secoue vivement la tête en remuant silencieusement les lèvres. Je suis incapable de voir d'ici ce qu'il articule mais je devine aisément ses intentions:" Maintenant tu ne peux plus échapper à ton destin".
    Piégée je me retourne vers la porte-fenêtre restée entrouverte prête à affronter mon père quand je vois Dave me regarder avec tristesse campé sur le pas de la porte la main posée sur la poignée:
    - Là où on s'aime il ne fait jamais nuit, chuchota t il pour que je sois la seule à l'entendre.
    Alors il déverrouilla la chaîne et tourna la poignée:
    -Ne fais pas ça, ou tu vas le regretter! L’exhortai-je.
    Au lieu de suivre mes conseils il me tourna le dos et ouvrit. Aussitôt il fut encerclé et mon père le menotta solidement:
    - DAVID!! Hurlais je en bondissant en avant les bras tendus.
    Mon père fit signe à l'un de ses sbires qui parvint difficilement à me maîtriser.
    J'eus à peine le temps de remarquer qu'il portait une blouse blanche avant de perdre connaissance.

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