• Chapitre 6: Double jeu:

    Après le déjeuner, je consacrais l'après midi à mener à bien mes travaux de rénovation, aidée de Phantom qui se révéla être bon bricoleur.
    Sol et les autres étaient partis zoner sur les bords de la Seine donc nous étions seuls dans l'édifice.
    Ce climat d'intimité ne m'était pas familier et j'étais profondément mal à l'aise, avec tous les efforts du monde pour ne pas le montrer.
    D'autant lus que les mots étaient inutiles, car chacun anticipait l'action de l'autre sur une simple intuition.
    A mes yeux tout devenait magnifique, d'une beauté simple. Une goutte d'eau qui roulait sa goutte le long d'une vitre ébréchée. Un fragment de fresque aux couleurs fatiguées au bas d'un mur décrépi.
    Une tache de rouille semblable à une fleur ouverte en corolle.
    Je m'émerveillais de rien et de tout à la fois.
    Je me sentis pousser des ailes tant j'avais le sentiment d'être revenue à la vie.
    Phantom s'apprêtait à se confier à moi à la faveur du crépuscule lorsque la bulle de bonheur qui nous entourait, protectrice et apaisante, vola en éclats. Le temps reprit son cours, la réalité revint au galop:
    - Y'a quelqu'un?
    Cette voix hautaine et haut perchée, je l'aurais reconnue entre toutes, elle hantait mes pensées les plus sombres: Clara.
    Phantom tiqua et posa une main amicale sur mon épaule en m'invitant à me réfugier dans ma chambre dans l'attente qu'il ait calmé, éventuellement résolu la situation.
    Tandis qu'il parlementait avec Clara, je ne pus m'empêcher d'écouter aux portes, tous les sens en alerte.
    Des bribes incompréhensibles me parvinrent, à son ton ferme voire agressif je devinais qu'ils se disputaient et que cela allait de mal e pis de minute en minute.
    Une heure plus tard, ce qui me parut une éternité au bas mot, il revint nerveux et gêné.
    - Tu devrais partir maintenant, avant que l'esclandre n'éclate. Clara s'installe au Radeau.
    - Pourquoi moi? m'indignais-je. Puisqu'il n'y a plus de studio disponible qu'elle aille s'installer ailleurs!
    Ce serait trop long à t'expliquer mais on ne se supporte plus suffisamment pour cohabiter dans la même chambre.
    - Et si je m'installe avec toi?
    - N'y pense pas, elle serait jalouse tellement tu l'insupportes.
    - Es tu toujours obligé de te référer à quelqu'un d'autre pour formuler une opinion ou légitimer une décision? Aie confiance en toi, si tu m'aimais vraiment tu ne te serais probablement pas posé cette question.
    - Tu ne sais pas de quoi elle est capable, juste pour se venger. Cesse de t'attirer des ennuis inutiles.
    - Mais je t'aime Phantom!
    Ses yeux s'écarquillèrent devant tant de spontanéité et il me tourna le dos pour cacher sa gêne.
    - Phantom? m'enquis je, inquiète la gorge nouée.
    - Ne rends pas les choses plus compliquées qu’elles ne le sont déjà! assena-t-il, les larmes aux yeux.
    - Phantom, puisque je n'ai visiblement pas le choix, puis je au moins m'installer avec toi pour la nuit?
    Il n'eut pas le temps de répondre: depuis les escaliers Clara le héla:
    - Apparemment y'a plus de place. Mais je crois me souvenir que t'as une chambre assez grande pour deux...
    Phantom me regarda avec un air désolé et répondit:
    - Pas de problème, tu peux même rester autant de temps que tu voudras, l'un des appartements devrait se libérer demain.
    Je ressentis un violent sentiment de trahison que je n'avais jamais ressenti pour quiconque:
    - Je pensais enfin avoir sincèrement confiance en quelqu'un sur qui compter... Tu me déçois profondément, comment pourrais je te le pardonner?
    - Je n'ai pas besoin de ton pardon, tu me dis d'avoir confiance en mes choix Luna donc je le fais.
    La survie du Radeau tout entier est en jeu car Clara serait capable de me faire chanter en menaçant de tout dénoncer à la police.
    - Tu me renierais pour une stupide histoire de rivalité? Toi et Clara vous êtes pourtant séparés...
    - Si tu veux qu'on reste ensemble, tels des joueurs de poker nous devrons jouer au jeu de l'amour et du hasard.
    Il s'apprêtait à me prendre dans ses bras quand Clara tambourina à la porte, furieuse:
    - Ouvre Phantom! Je sais que tu es là!

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